Un escape game à distance, c’est possible ?

L’action se déroule un lundi en fin de journée. Une quinzaine d’auditeurs du Cnam ont rendez-vous à distance pour expérimenter un nouvel escape game produit par le Living Lab du Cnam. Ils sont inscrits à l’Unité d’Enseignement CCG100, consacrée à la découverte de la comptabilité de gestion et du contrôle de gestion.
Bénédicte GRALL, maître de conférences et enseignante de cette UE au Cnam Paris, est à l’origine de cette rencontre. Elle a participé à la création de ce jeu avec ses collègues du Cnam Pays de la Loire, Capucine d’AUDIFFRET et Inès BOUSSORA. Toutes les trois ont été accompagnées par une ingénieure pédagogique du pôle innovation du Cnam PDL, Hélène MEYER.
Leur collaboration a permis de définir les objectifs pédagogiques du jeu, créer un scénario, et concevoir des activités favorisant la progression dans le jeu. L’outil Genially a été choisi pour mettre en forme cet escape game numérique.
Le Living Lab Sofa s’est glissé dans cette classe virtuelle pour observer les réactions et l’engagement des participants. Réaliser un escape game à distance est un vrai défi. Alors comment les élèves s’en sont-ils emparés ? Quelles sont les conditions pour garantir une expérience réussie ? C’est l’objet de cet article.

Inscrire l’escape game dans le déroulé et les objectifs du cours
L’escape game expérimenté porte sur le calcul d’un coût de revient, un thème abordé au début du cours. L’équipe enseignante l’a donc conçu pour donner envie aux apprenants de s’engager dans cette partie du cours, alors que le sujet peut paraître abrupt au premier abord.
En début de séance, Bénédicte a rappelé les objectifs de l’escape game et a expliqué comment il s’articulait au cours. Le jeu est un moyen de réviser les apports de la première séance et de préparer la classe virtuelle suivante.
Première condition de réussite donc, articuler le jeu dans un déroulé cohérent du cours.

Faire jouer en sous-groupe pour bénéficier de l’intelligence collective
Afin de développer l’esprit collaboratif et l’intelligence collective propres aux escape games, les apprenants ont été répartis en cinq groupes de trois à quatre personnes. L’outil de classe virtuelle BigBlueButton, disponible sur la plateforme pédagogique Moodle, permet la répartition en salle de manière aléatoire ou choisie par l’enseignant. Bénédicte a décidé de laisser faire le hasard pour la composition des groupes.

 Il est important que tous les participants commencent à jouer simultanément. Bénédicte a donc communiqué le lien du jeu juste au moment où les apprenants ont été répartis dans les salles virtuelles. Dans chaque salle, un apprenant a partagé son écran pour permettre une visualisation collective du jeu.
Condition de réussite supplémentaire donc, disposer d’outils collaboratifs adaptés, permettant échanges et visualisation partagée.

Un scénario et des énigmes qui maintiennent l’attention
Tout l’enjeu d’un escape game en formation est de produire une activité ludique et formatrice. Ludique, car ce format stimule l’attention et l’implication des apprenants par les activités proposées. Formatrice, car elle permet de comprendre et de mémoriser autrement des contenus de cours.
Dans l’expérience observée, l’engagement était au rendez-vous dans tous les groupes. Tous se sont très vite organisés et se sont lancés dans la résolution des problèmes et des énigmes proposées. Evidemment, certains apprenants ont pris le leadership, mais dans les groupes que nous avons pu observer, le mode collaboratif s’est toujours imposé. Les apprenants devaient d’ailleurs souvent coopérer pour résoudre les différentes énigmes (mot croisés, mots cachés, quiz, calculs de coûts…) qui leurs étaient proposées. Les apprenants, interrogés ensuite par questionnaires, ont souligné la qualité de l’univers narratif du jeu, de son design et de ses animations. Ils ont également validé la pertinence des contenus abordés, notamment sur les difficultés d’affectation des charges indirectes dans ce calcul du coût de revient. 
Autre garantie de succès donc, un scénario immersif permettant d’appliquer les connaissances dans un contexte réaliste.

Prévoir un facilitateur pour guider les participants en cas de blocage et assurer une bonne dynamique de jeu
Tout au long de la séance, l’enseignante est intervenue dans les différentes salles virtuelles pour accompagner les groupes et réguler leurs apprentissages et leur progression dans le jeu. En effet, il est important de s’assurer que les apprenants ne restent pas bloqués face à une énigme, ce qui pourrait les décourager. Ici, Bénédicte renvoyait souvent à des éléments de son cours pour donner des indices, ce qui incitait les élèves à s’y plonger. Ou alors elle les accompagnait dans leur raisonnement, sans leur donner directement la réponse.
Cette « régulation » ou « facilitation » est également une condition de réussite d’un escape game à distance.

 Un bilan concluant
Même si tous les groupes n’ont pas eu le temps d’aller au bout du jeu, tous ont apprécié cette manière différente d’apprendre. Lors du bilan réalisé avec les élèves au bout d’une heure de jeu, il est ressorti un véritable enthousiasme pour la méthode utilisée. Certains ont souligné le plaisir de « mener l’enquête et l’investigation ». D’autres ont apprécié l’apprentissage par la pratique pour « comprendre la manière de faire tel ou tel calcul », « la manière de raisonner », d’autres encore ont aimé la mise en situation réaliste : « On voyait vraiment les conséquences de nos décisions dans le jeu” ou « à quoi ça sert vraiment ».

L’escape game a stimulé plusieurs apprenants à se plonger dans les cours : « j’ai vu l’importance de suivre les cours au fur et à mesure », explique un participant.

Certains souhaitent que tous les cours se fassent désormais comme ça ! Un participant s’exclamant même : « jusqu’à présent je ne comprenais rien au calcul du coût de revient, et là j’ai tout compris ! ».

Bénédicte GRALL se dit également satisfaite : « C’était vraiment sympa à animer. Cela a vraiment permis aux étudiants de comprendre que le coût de revient calculé est dépendant de l’affectation des charges indirectes. Et moi cela m’a permis indirectement d’évaluer leur niveau et d’adapter mes séances à suivre. Surtout, cela change des modalités habituelles !».

L’escape game constitue donc un moyen original d’acquérir de nouvelles compétences ou connaissances, mais aussi, potentiellement, d’évaluer des acquis de manière formative et non stressante.

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