Lors de la construction des deux parcours multimodaux expérimentés chez Dalkia Froid Solutions, nous avons posé l’hypothèse qu’alterner les modalités de formation permet de mieux apprendre une activité professionnelle. Nous nous sommes également questionnés sur la place de l’AFEST par rapport aux autres modalités, en nous posant la question suivante : que se passera-t-il si un apprenant se retrouve face à une situation d’AFEST plus complexe que celle abordée en formation classique ? Les deux expérimentations, menées avec des techniciens frigoristes et des techniciens process cuisson, nous ont permis de mener une première analyse de ce lien entre les compétences acquises lors de la formation présentielle et leurs mises en pratique lors des séquences AFEST. Pour le comprendre, nous avons observé différentes séquences AFEST, toutes positionnées après un module de formation présentielle.
Il en est ressorti trois cas de figures différents.
Premier cas : l’apprenant dispose des compétences nécessaires à la réalisation de la tâche professionnelle qui est réalisée en AFEST. La mise en situation suivie de la séance de réflexivité est alors vraiment efficace : l’apprenant est en capacité de réaliser la tâche dans son intégralité sans intervention du formateur et il est en mesure d’analyser par la suite chacune de ses actions. L’apport final du formateur est alors impactant et l’apprenant s’y réfère par la suite, par exemple lors des temps collectifs de formation.
Second cas : l’apprenant n’a pas acquis toutes les compétences nécessaires à la réalisation de la tâche. Cela s’est produit plusieurs fois, et ce pour différentes raisons : soit le module de formation présentielle n’était pas assez complet en amont, soit le niveau de l’apprenant était trop fragile, soit l’organisation du travail fait que la séquence AFEST réalisable au moment où l’apprenant et le formateur sont disponibles n’est pas suffisamment adaptée.
Dans ce cas, l’apprenant peut commencer la situation mais est vite mis en difficulté. Le formateur AFEST change alors de posture pour devenir tuteur. Il reprend la main pour montrer et expliquer les actions à mener. L’apprenant est attentif et pose des questions au fur et à mesure. Le formateur demande ensuite à l’apprenant de mener l’action par lui-même ou de reformuler ce qui a été vu si ça n’est pas possible.
Même si la séquence AFEST s’est transformée en situation de tutorat, les retours sur ce cas de figure restent positifs. L’apprenant a bénéficié des apports d’un expert métier, en lien avec une situation de travail, et est conscient d’avoir eu un échange individuel et privilégié. Cependant, il est plus compliqué d’observer la mise en raisonnement de l’apprenant car il n’y a pas de séance de réflexivité. Il n’est alors pas possible de valider que l’apprenant saura faire face seul à la situation de travail.
Troisième cas : le formateur AFEST est en difficulté par rapport la réalisation de la tâche. Pour l’organisation des AFEST, telle qu’elle a été pensée au démarrage dans le cadre des expérimentations, c’est le formateur qui se déplace dans le secteur de l’agence de l’apprenant. Le formateur arrive donc chez un client qu’il ne connait pas, et peut se retrouver confronter à des machines sur lesquelles il n’a pas l’habitude de travailler. Il s’appuie alors sur son expérience pour résoudre une situation complexe. L’apprenant est partie prenante dans cette recherche et participe à l’élaboration des actions à mener pour réaliser la tâche.
Même si la séquence AFEST n’a alors pas lieu, l’expert métier partage son expérience et l’apprenant sait en tirer bénéfice. Ce troisième cas de figure est le plus inconfortable pour le formateur. Il doit sans cesse osciller entre deux postures : celle du technicien expert et celle de l’accompagnateur-tuteur.
Sur ces trois cas de figure, la première situation fut majoritaire lors des deux premières expérimentations. Plusieurs séquences AFEST ont été menées dans de bonnes conditions, et les apprenants ont su en tirer profit. Cependant, il apparait que, même si la séquence AFEST ne peut se dérouler correctement (suite à une mise en difficulté de l’apprenant ou du formateur), le partage entre un expert métier et un novice dans une situation de travail est toujours perçu comme un moment privilégié de formation, parce qu’il est individuel et parce qu’il est ancré dans une réalité professionnelle « sur le terrain ».
Nous pouvons donc établir un premier enseignement par rapport à l’hypothèse de départ : la bonne alternance des modalités est cruciale pour apprendre une activité professionnelle. Si la situation de travail n’est pas assez en résonnance avec le module de formation présentielle vu en amont, l’apprenant comme le formateur peuvent se trouver en difficulté. La deuxième observation montre qu’un échange en situation professionnelle entre un novice et un expert est toujours perçu de manière positive, et est donc source de motivation et d’implication pour l’apprenant.
Exemples de séquences AFEST